L’horreur économique est-elle soluble
dans la langue de porc en gelée ?


Le salon de l’agriculture ouvre chaque année ses portes à Paris. Enfin la campagne vient rendre visite à la capitale. Un vrai bol d’air Porte de Versailles. A chaque fois, j’en profite pour faire le tour des stands des régions avec une légère préférence pour la viticulture. Ah la nature, le terroir, les beaux et gros animaux, leurs odeurs fortes, leurs concours d’élégance, ah la campagne, le retour à la vraie vie.

Enfin il y a les mythes pour citadins en quête d’oxygène et puis il y a la réalité. La nature ne serait-elle pas naturelle ? Il est rare que les plantes poussent en carrée, que les montagnes aient un relief en escalier et que la vache soit adaptable à tous les climats. Eh oui, cela fait des siècles que les humains travaillent la nature, c’est pour cela qu’elle est devenue la campagne.

Pendant ces siècles, cela n’a pas été aussi grave, les résultats étaient même probants, fait de jardinages et de spécialités régionales qui font toujours les charmes de nos cuisines.

Vous allez me dire que je vais encore jouer de la nostalgie et critiquer le productivisme de l’agriculture contemporaine. Il est vrai que la course aux rendements pose des problèmes d’environnement préoccupants. Il est encore plus vrai que le poids démographique n’a pas allégé l’exigence des besoins.

Mais l’agriculture et sa proche parente l’agro-alimentaire sont frappées comme les autres branches de l’économie par les besoins ... de la finance. Le mécanisme est simple. La recherche de productivité se traduit par une accumulation de bénéfices qui se transforme en plus-values boursières. Le XXI° siècle ou le siècle du dividende. Les investissements étant de plus en plus lourds, il faut surtout satisfaire l’investisseur appelé aussi actionnaire ou fonds de pension américains. A partir de là tout est permis.

Que fait-on quand on achète des actions, on joue en bourse, et la formule n’est pas un euphémisme. Petits (ou gros) porteurs mode d’emploi. On a de l’argent, avant on l’investissait dans la production, maintenant on le parie comme au quinté dans la bourse. Je vous entends déjà maudire ma bêtise naturelle en considérant que la bourse est sérieuse tant elle anticipe les fondamentaux des entreprises.


Fondamentalement, vous êtes dans l’erreur. L’actionnaire sérieux se moque de l’entreprise dans laquelle il investit ... parfois moins d’un quart d’heure. L’important est le tendanciel de la courbe, ses seuils de rupture. Un frémissement vers +3 j’achète, vers - 4 je vends. Vous avez parié le bon coup, vous êtes un génie, le mauvais coup vous êtes devenu le roi des ....

L'entreprise est alors contrainte à la transparence, à la productivité à tout prix, voire au monopole pour s’assurer un semblant de stabilité financière. Dans la production de chaussures ce n’est pas trop grave, vous aurez simplement mal aux pieds. Dans l’agricole ce petit jeu vous fera parfois mourir. On appelle cela la vache folle ou la listéria ou d’autres saloperies que l’on ne connaît pas encore. Connaissez-vous la seule véritable sanction qu’a connue l’entreprise supposée à l’origine de l’épidémie de listériose de 1992 ? Une grave chute à la bourse il y a quelques semaines. La langue de bois de son P.D.G est insupportable comme une vieille cochonnaille mais il faut bien que le titre remonte. La vache folle, encore une affaire d’argent bien gras sous couvert de lobbying européen, et le transgénique, encore pire, une monopolisation des moyens de production céréaliers, de quoi rendre heureux le plus simpliste des actionnaires. Monopole, transparence qui n’est que le mot pudique pour dire espionnage. Echelon, les grandes oreilles anglo-saxonnes, soyons discrets on pourrait être écouté, vache folle, maïs transgénique, même combat et même péril, mais la bourse est heureuse tant elle anticipe un monde à venir fait de bonheur. Heureusement le porc finit par tirer une langue en gelée, ce porc de virginie auquel nous ressemblons tant, que l’on nous mène trop souvent à l’abattoir.


Une autre chronique de l'impertinent Indic !


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