Rachetée il y a sept ans aux frères Costes par le duo Alexandre Chapon (Pamela Popo, Vins des Pyrénées, l'Enoteca) et Jean-Philippe Leboeuf (Le Clocher Pereire), cette ancienne boulangerie reconvertie depuis l'an 1780 en restaurant aux airs de bistrot chic et (faussement) désuet verse désormais dans l'œcuménisme, faisant cohabiter pacifiquement un flot ininterrompu de touristes, de peoples affamés, de promeneurs égarés et d'autochtones du quartier.
On se souvient alors que l'inventeur du terme « restaurant », qui régalait autrefois Paname de ses bouillons longuement et savamment mijotés se nommait Boulanger (comme par hasard), et qu'il lança le concept à peine quinze ans plus tôt, en 1765. On en viendrait presque à se prendre pour les figurants d'un énième opus du film « Les Visiteurs ». Mais la play-list bien actuelle distillée crescendo viendra vite nous rappeler que nous sommes bien ici et maintenant. Finalement, ça n'est pas plus mal.
Si il y a une dizaine d'années, le propriétaire de l'époque avait quelque peu négligé sa maison (tables claudicantes, banquettes constellées d'accrocs, voilages maussades...), la nouvelle équipe a su rendre toute sa superbe à cette emblématique adresse qu'est Chez Julien (une institution de toujours, dans le quartier), avec ses tables de bistrot vernies joliment ornées de chandeliers rétros, ses tableaux et ses miroirs baroques et son mignon petit zinc d'époque.
L'on a même adjoint à la petite terrasse en façade deux autres spacieuses terrasses dans la rue piétonne adjacente.
Un décorum idéal pour se délecter de la belle cuisine aux accents bistronomiques de Jean-Philippe Leboeuf, qui a roulé sa bosse aux côtés de quelques « pointures » telles que Grondard, Alleno ou encore Dutournier.
On ne manquera pas, toutefois, de commander l'un des agréables cocktails en guise de préambule, comme le rafraîchissant Pamela Popo (15 €) à base de vodka, de citron vert et de cranberry.
Mais voici qu'arrivent déjà mes croustillants de gambas au chorizo (15 €) : une pâte à brick fourrée de gambas cuites juste comme il faut et condimentées de quelques éclats de chorizo.
Mon invitée, quant à elle, a jeté son dévolu sur une fraîche salade de tourteau, chèvre frais et avocat (16 €) accompagnée d'une excellente et authentique sauce cocktail, relevée comme il se doit d'une goutte de cognac.
Pour suivre, n'hésitez pas à goûter le délicat cochon fermier au miso (26 €), accompagné d'une savoureuse mousseline de champignons au goût de truffe bien marqué.
En face de moi, la volaille fermière rôtie accompagnée de pommes grenailles confites au jus (23 €) semble bien faire les affaires de ma convive : elle ne décolle plus le nez de son assiette. Je me dépêche d'asséner trois coups de fourchette à son plaisant volatile avant qu'il ne se volatilise pour de bon.
La chair est fondante et les pommes de terres s'ébattent lascivement dans un jus bien réduit. Je devine une saveur très légèrement anisée : nous posons la question au Chef. Bingo ! La volaille est pochée dans un bouillon relevé de Pastis avant d'être rôtie. On n'est pas peu fiers d'avoir percé un tel secret de fabrication et du coup, nous ne serons pas privés de dessert.
Je commence pourtant à ne plus avoir très faim. Les portions sont généreuses.
Et si la crème brûlée pistache framboise (10 €) de nos voisines anglo-saxonnes me fait immodérément de l’œil, je me rabats sur une raisonnable et fraîche salade de fruits rouges, basilic et sorbet yaourt (10 €).
Le choix de ma complice du jour se porte sur la tartelette maison au citron meringuée, avec une pâte sablée un peu dense, mais garnie d'une remarquable crème au citron (on aurait aimé qu'il y en ait un peu plus) et surmontée d'une meringue toute en légèreté.
Courte, mais jolie carte de vins sélectionnés par Bérénice Goebel, des Caves Legrand, avec quelques références servies au verre (de 7 à 10 €) ou en bouteille (de 30 à 110 €).
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